Mais qu’est-ce que ce bruit? C’est peut-être notre groin collectif qui fouille dans l’auge de l’énergie mondiale.
C’est indéniable. Côté consommation d’énergie, nous sommes des goinfres en Amérique du Nord. Il ne peut en être autrement avec le style de vie que nous avons. Grosse maison? Deux voitures ou plus? Air climatisé central, gadgets électroniques de toutes sortes et toute la panoplie d’électroménagers? Bienvenue dans le monde des gloutons énergivores.
Les Nord-Américains ont un style de vie qui en fait des gloutons énergivores. Photo : iStockPhoto
Consommateurs énergivores
Selon les calculs que le géologue canadien David Hughes a effectué à partir de données extraites d’un rapport de 2009 de la Energy Information Administration des États-Unis, la consommation moyenne d’énergie par personne est quatre fois plus élevée en Amérique du Nord que dans le reste du monde (PDF). De façon absolue, les Nord-Américains consomment le quart de la production d’énergie primaire de la planète, même s’ils ne représentent pas tout à fait 7 % de la population mondiale. De plus, un nouveau rapport de World Wildlife Canada place le Canada et les États-Unis dans le groupe des 10 pays dont l’empreinte écologique par personne est la plus élevée.
Historiquement, notre niveau de vie a été favorisé par la disponibilité d’une énergie abondante et relativement peu coûteuse, provenant essentiellement des hydrocarbures. On pourrait discuter longuement de la quantité de pétrole, de charbon et de gaz naturel qu’il reste à exploiter, mais une chose est sûre, cette ressource est limitée.
La conservation d’abord
C’est pourquoi la conservation de l’énergie devrait être une priorité pour tous, surtout dans le contexte actuel où la demande d’énergie continuera d’augmenter, comme nous l’avons expliqué dans un numéro antérieur.
Mais vous vous dites « un instant! ». Quel intérêt une société comme Suncor dont le chiffre d’affaires provient en grande partie de la vente de combustibles fossiles peut-elle avoir à encourager une diminution de la consommation d’énergie? Eh bien, c’est que comme vous, nous voulons qu’il reste de l’énergie pour les générations futures.
Faire passer le message de la conservation n’est pas facile. Comme fumer, manger ou regarder les émissions de téléréalité, la gloutonnerie énergétique est une habitude bien enracinée. Les sociologues ont démontré que les gens s’engagent plus facilement dans de l’action positive de façon régulière s’ils voient clairement le lien entre leur comportement et les résultats visés.
Esclaves producteurs d’énergie
Malheureusement, sur le front de la conservation de l’énergie, il n’est pas possible de voir les réserves d’hydrocarbures de la Terre diminuer chaque fois que nous appuyons sur l’accélérateur de notre bolide sur quatre roues. Nous pouvons, cependant, faire appel à notre imagination. Supposons que nous puissons exprimer notre consommation d’énergie en esclaves producteurs d’énergie. Plus nous consommerions, plus il y aurait d’esclaves à notre service exclusif.
S’inspirant des travaux de David Hughes sur la relation entre l’énergie et le travail humain, l’auteur Samuel Alexander a exploré ce concept dans un exposé intitulé Peak Oil, Energy Descent, and the Fate of Consumerism (PDF).
Une personne en santé qui pédale rapidement sur une bicyclette peut produire assez d’énergie pour alimenter une ampoule de 100 watts. Si elle pédale ainsi huit heures par jour, cinq jours par semaine, il lui faudrait environ 8,6 années pour produire l’équivalent de l’énergie que contient un baril de pétrole. (On lui devrait d’ailleurs à peu près 138 363 $ pour son labeur, compte tenu du salaire minimum en vigueur.)
Combien d’entre nous choisiraient la voiture pour aller chercher son café dans le quartier plutôt que la marche s’il fallait, pour ce faire, réduire à l’esclavage certains de nos congénères? Et que feriez-vous s’il fallait que vous produisiez vous-même l’énergie, avant de prendre votre café?
Garder l’eau chaude
Pour sa part, la société britannique BBC n’a pas hésité à produire la vidéo qui suit sur la filière énergétique humaine. Nul besoin de faire appel à son imagination pour constater l’effort qu’un peloton d’esclaves cyclistes a dû déployer pour garder de l’eau assez chaude pour une douche. Pas moins de 70 cyclistes se sont défoncés sur leur vélo pour que l’eau chaude de la douche puisse couler pendant seulement deux minutes.
Si le travail humain n’est pas près de remplacer les sources traditionnelles d’énergie, nous, les gloutons énergivores, devrions peut-être y penser à deux fois avant de tourner la clé de contact ou d’actionner un interrupteur. Les générations futures en dépendent.
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